Un DRH peut être licencié pour ne pas avoir respecté les prérogatives d’un CE
Dans une décision récente, la Chambre sociale de la Cour de cassation a offert une illustration des conséquences pour un Directeur des Ressources Humaines du non-respect de ses obligations vis-à-vis des instances représentatives du personnel.
- La non-exécution par un DRH de ses obligations professionnelles peut motiver son licenciement
Dans ce litige, un salarié, Directeur des Ressources Humaines d’une entreprise pharmaceutique, avait été licencié pour faute grave suite à divers manquements aux obligations découlant des fonctions dont il était investi.
L’employeur reprochait à l’ancien DRH de multiples insuffisances professionnelles, notamment :
- Ne pas avoir mis en place une base des données économiques et sociales (BDES) suscitant le mécontentement des membres du comité d’entreprise et la menace d’une action pour délit d’entrave ;
- Ne pas avoir procédé à une évaluation des salariés soumis à des risques ce qui avait empêché de procéder aux déclarations des expositions à des facteurs de risques professionnelles requises par la loi, mais aussi de n’avoir entrepris aucun diagnostic en vue de déterminer s’il était nécessaire de conclure un accord de prévention des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels ;
- Ne pas avoir entrepris d’actions pour l’organisation et la tenue des entretiens professionnels des salariés qui auraient dû être mis en place plusieurs mois plus tôt ;
- Ne pas avoir respecté les engagements de souscrits dans un accord collectif l’entreprise issu des négociations annuelles obligatoires relatif à la mise en place de niveaux de classification intermédiaires.
Licencié pour faute grave, l’ancien DRH n’a perçu ni d’indemnité de licenciement, ni d’indemnité compensatrice de préavis, ce qu’il contesta devant la juridiction prud’homale.
Dans cette décision, la Chambre sociale de la Cour de cassation est amenée à se prononcer sur la décision rendue en appel qui avait tranché le litige en faveur de l’ancien salarié.
En effet pour la cour d’appel, l’employeur invoquait, dans la lettre de licenciement, uniquement le fait pour l’ancien DRH de ne pas avoir exécuté des attributions relevant de ses fonctions mais ne lui reprochait pas un comportement fautif, à savoir d’avoir agi de manière délibérée ou d’avoir fait acte d’insubordination. Dès lors pour la cour, le licenciement ne pouvait reposer sur la faute du salarié et était donc sans cause réelle et sérieuse.
Au contraire, l’employeur soutenait que les manquements répétés de l’ancien DRH à ses obligations professionnelles constituaient un comportement fautif rendant impossible son maintien dans l’entreprise. Argumentation que l’entreprise a fait valoir devant la Cour de cassation en reprochant à la cour d’appel de ne pas avoir procédé à l’examen de chacun de ses griefs et de ne pas avoir rechercher si les actes du salarié ne constituaient pas une carence totale et délibérée à ses obligations professionnelles.
La Cour de cassation répondit favorablement aux demandes de l’employeur en réfutant la décision de la cour d’appel au motif que cette dernière aurait dû rechercher, comme le demandait l’employeur, si le comportement de l’ancien DRH ne résultait pas d’une mauvaise volonté délibérée de sa part. Autrement dit, la cour d’appel aurait dû rechercher l’existence ou non d’une faute de l’ancien DRH dans l’exécution de ses missions.
- Le DRH, garant du respect du droit du travail, peut être sanctionné en cas de défaillances aux obligations légales de l’entreprise
Salariés, élus du CSE, délégués syndicaux, n’oubliez pas que le Directeur des Ressources Humaines est le représentant de votre entreprise, mais c’est avant tout un salarié de l’ entreprise dès lors soumis au respect des missions et attributions qui lui sont confiées par son contrat de travail.
A ce titre, le DRH est tenu d’une part de veiller au respect des dispositions légales et réglementaires s’imposant à l’entreprise, auxquelles figurent l’obligation de mise en place d’une BDES pour les entreprises de plus de 50 salariés, et d’autre part d’organiser et animer les instances représentatives du personnel.
Les éventuels manquements à ces obligations peuvent donc a minima motiver un licenciement pour insuffisance professionnelle du DRH négligeant et freinant le bon fonctionnement des IRP.
Source : Cass., soc., 27 janvier 2021, 19-16.692, Inédit
Marie-Antoinette Mavoungou, Juriste