Salariés lanceurs d’alerte : après le cadre général, les modalités de recueil des signalements sont précisées

La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (dite « Loi Sapin II ») traçait ce qui devait être le contour à gros traits du statut de lanceur d’alerte, créant notamment l’obligation, pour les entreprises d’au moins 50 salariés, d’esquisser une procédure de recueil des signalement émis.

Un décret (n°2017-564) devant préciser cette large obligation est finalement intervenu le 19 avril 2017, dessinant les modalités de mise en œuvre de cet impératif dont l’entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2018.

 

Les opérateurs concernés 

Sont soumise à l’obligation d’ériger une procédure de recueil des signalements de lanceurs d’alertes tant salariés que collaborateurs extérieurs, les entreprises d’au moins 50 salariés, dans les conditions de droit commun (art. L.1111-2 et L.1111-3 du Code du travail), atteint 12 mois durant, consécutifs ou non, au cours des 3 années précédentes.

Une fois cette effectif atteint, l’entreprise doit déterminer « l’instrument juridique le mieux à même de répondre à l’obligation d’établir une procédure de recueil des signalements et l’adopte conformément aux dispositions législatives et réglementaires qui le régisse. »

Dès lors, des entreprises incluses dans un groupe peuvent s’organiser afin que soit défini une procédure commune au groupe ou simplement à plusieurs d’entres elles et devront adopter des positions similaires en ce sens.

 

Les éléments obligatoires

Ladite procédure doit prévoir,

  • suivant quelles modalités le salarié ou collaborateur externe concerné adresse son signalement à
    •  un supérieur hiérarchique,
    • à l’employeur
    • ou à un référent*,
    • en fournissant – le cas échéant – les éléments de nature à l’étayer et à permettre un échange avec le destinataire final de ce signalement ;
  • les modalités d’information « sans délai » de l’auteur du signalement,
    • de la réception de ce dernier ;
    • du délai – « raisonnable et prévisible » – nécessaire à son examen ;
    • et des modalités d’information de l’auteur du signalement quant aux suites envisagées ;
  • les modalités dans lesquelles doit être prévenu l’auteur de ce signalement tout comme les personnes visées par ce dernier de la clôture des opérations de vérification de la recevabilité de son alerte et des faits (que nous désignerons par le terme d’‘’investigation interne’’);
  • les garanties assurant la stricte confidentialité tant de l’auteur du signalement que des faits objets de ce dernier et des personnes qu’il vise, et ce, y compris en cas de communication à des tiers lorsqu’un telle communication est nécessaire à l’« investigation interne » ;
  • les modalités de destruction des éléments composant le dossier de signalement qui pourraient permettre d’identifier son auteur et les personne visées, en l’absence de suite donnée ou au terme d’un délai qui ne peut en tout état de cause pas excéder 2 mois à compter de la clôture de l’« investigation interne » ;
  • et, enfin, la mention systématique de l’existence d’un traitement automatisé (soumis à l’autorisation préalable de la CNIL) des signalement lorsqu’il existe et l’identité du référent susceptible de recevoir les alertes.

 

La mise en place d’une telle procédure de recueil des signalements dans l’entreprise doit faire l’objet d’une information aux salariés et aux collaborateurs extérieurs par tout moyen, soit par voie de notification, d’affichage ou de publication voire – si il existe – sur le site internet de l’entreprise. Le décret précise à ce titre qu’une telle information peut être effectuée par voie électronique.

Notons, concernant le (*) référent visé par le décret, ce dernier précise qu’il peut s’agir d’une personne physique ou d’une personne morale dotée ou non de la personnalité juridique, interne ou externe à l’entreprise dès lors qu’elle dispose « par son positionnement, de la compétence, de l’autorité et des moyens suffisants à l’exercice de ses missions ».

D’aucuns auront relevé l’absence des termes impartialité et indépendance qui, si ils avaient effectivement conduit à limiter le nombre de ces « référents », auraient permis d’écarter un certain nombre de risques.

Pour autant, le décret prévoit que ce référent est tenu par la même obligation de préserver la stricte confidentialité tant des auteurs du signalement que des personnes qu’il vise et des informations recueillies.

 

(Notons enfin, qu’outre les entreprises d’au moins 50 salariés, sont visé par l’obligation les administration de l’Etat, les collectivités territoriales de plus de  10 000 habitants et leur établissements publics, ainsi que les établissement public de coopération intercommunale (EPCI)à fiscalité propre regroupant au moins une commune de plus de 10 000 habitants).

 

Frédéric ROUGON, Juriste

Sources :