PSE, le flou s’installe quant au suivi des mesures de reclassement

Les modalités de suivi de la mise en œuvre des mesures de reclassement déterminées au sein d’un plan de sauvegarde de l’emploi font, en principe, l’objet d’un consultation régulière et détaillée par le Comité d’Entreprise (CE).

A défaut, ce sont les délégués du personnel  (DP) qui exercent cette prérogative.

Leur avis est ensuite transmis à l’autorité administrative (DIRECCTE) associée à ce suivi.

Celle-ci reçoit, en outre, un bilan, établi par l’employeur,  de la mise en œuvre effective de ces mesures.

 

Ce dispositif issu de l’article L.1233-63 du Code du travail ouvre sur deux interprétations possibles :

  1. Soit seuls le CE et, à défaut, les DP sont compétents en matière de suivi de telles mesures de suivi des mesures de reclassement,

Dès lors, ils doivent au minimum être consultés régulièrement et de manière détaillée sur la question, les modalités de leur suivi étant détaillé au sein du PSE ;

  1. Soit sont définies deux obligations distinctes :
  • D’une part, le PSE doit prévoir les modalités entourant la mise en œuvre du suivi des mesures alors contenues dans le plan de reclassement.

Libre alors pour celui-ci de mettre ce suivi à la charge du CE ou des DP ou non ;

  • D’autre part, l’employeur doit consulter le CE ou les DP sur ce suivi, et ce, de manière régulière et approfondie

Dès lors, ils doivent au minimum être consultés régulièrement et de manière détaillée sur la question, les modalités de leur suivi étant détaillé au sein du PSE.

 Se fondant sur la première interprétation, la cour administrative d’appel de Paris (par un arrêt du 4 août 2016, n° 16PA01718)  annulait la décision  de la DIRECCTE ayant validé un accord collectif majoritaire sur le PSE, au motif que l’accord ne prévoyait aucunement les modalités de suivi par le CE de la mise en œuvre des mesures de reclassement prévues par le PSE.

En l’occurrence était instituée une commission de suivi présidée par l’employeur et comprenant un membre du comité élu par lui.

La cour considère qu’un tel organe ne peut se substitué à l’exigence légale visant à ce que soit défini les modalité d’information du CE, ou à défaut, des DP auxquels seuls incombent, en application de la loi, le suivi de la mise en œuvre du PSE.

La Cour d’appel de Douai  (dans un arrêt rendu le 17 novembre 2016, n° 16DA01513), quant à elle, opte pour la seconde interprétation.

Elle considère d’abord que le dispositif précité impose que le PSE détermine les modalités du suivi de la mise en œuvre des mesure de reclassement, d’une part,

et que ce suivi doit faire l’objet d’une consultation régulière et détaillée du CE (ou, à défaut, des DP), d’autre part. Ces exigences n’impliquent alors pas que les modalités suivant lesquelles le CE ou les DP seront consultés soient expressément prévues par le PSE. Ce dernier doit se limiter à définir les conditions dans lesquelles ledit suivi sera effectivement réalisé.

La cour d’appel porte ensuite son attention sur l’organisation mise en place précisant que le suivi de l’application des mesures de reclassement dans l’entreprise concernée sera assurée par une commission composée de 3 membres désignés par les représentants du personnel, d’un représentant par organisation syndicale et de 2 représentants de l’employeur.

Les juges considèrent alors qu’une telle structuration permet effectivement un suivi opérationnel du plan de reclassement et qu’elle n’est pas contraire au texte de l’article L.1233-63, ne faisant pas obstacle, en particulier, à ce que le CE soit régulièrement consulté et exerce les prérogatives qui lui été reconnu par le législateur.

La position du Conseil d’Etat sur la question, est dès lors fortement attendue.

 

Frédéric ROUGON, Juriste