Loi travail, la réforme du licenciement économique entrée en vigueur au 1er décembre 2016
Réécrit par l’article 67 de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, l’article L.1233-3 du Code du travail disposant en matière de licenciement économique s’est vu compléter par des indicateurs.
Notons dès à présent que si peu des nouvelles dispositions devraient avoir un impact réel sur les opérateurs, certaines des mesures issues de la loi ne consistant qu’en une codification de solutions jurisprudentielles établies, la précision apportée à la notion de difficultés économiques de nature à justifier un licenciement économique devrait impacter, dès à présent, les entreprises.
Codifications à Droit constant
Deux motifs de licenciements économiques supplémentaires, correspondant à l’entrée dans le code de solutions dégagées par les juges de la Cour de cassation, viennent compléter l’article L.1233-3:
– La réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité (fondement admis par la haute juridiction depuis 1995) ;
– La cessation d’activité de l’entreprise (cause autonome de licenciement économique depuis 2001).
En outre, simple transposition de la jurisprudence constante de la Cour en la matière,
le licenciement pour motif économique n’est légitime que si le contexte économique a conduit à :
– une suppression ;
– une transformation de l’emploi ;
– ou à une modification du contrat de travail refusée par le salarié.
Concernant la réalité de cette suppression, transformation ou modification, la loi précise qu’elle s’apprécie au niveau de l’entreprise, peu important qu’elle fasse partie d’un groupe.
Nouveautés
Le Code du travail fixe depuis le 1er décembre 2016, date d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, les critères objectifs de nature à caractériser les difficultés économiques qu’une entreprise peut avancer afin de justifier un licenciement économique.
Dès lors, au surplus de tout autre élément de preuve apporté par l’employeur de nature à les justifier, les difficultés économiques sont caractérisées par l’évolution significative d’au moins un* des indicateurs suivants (*un seul de ces critères, s’il est rempli, devant suffire à établir le motif économique fondant le licenciement)
1. Une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires
Ladite « évolution significative », ayant été précisée par le législateur pour la baisse des commande/du chiffre d’affaires, doit s’apprécier non seulement en comparaison avec la même période de l’année précédente (période de référence) mais également sur une durée prédéfinie en fonction de l’effectif de l’entreprise, soit pour une entreprise de:
Moins de 11 salariés : 1 trimestre ;
11 à 49 salariés : 2 trimestres consécutifs ;
50 à 299 salariés : 3 trimestres consécutifs ;
300 salariés et plus : 4 trimestres consécutifs.
Notons que si cette baisse connaît aujourd’hui un minimum en durée pour constituer le fondement d’un licenciement économique, le législateur s’est gardé de définir un minimum concernant l’intensité de cette dernière, laissant au juges du fond, en cas de litige, la libre appréciation de l’impact de cette baisse sur les commandes ou le chiffre d’affaires de l’entreprise concernée.
Au-delà, la loi ne précise ni les modalités de décompte des effectifs (qui s’alignent ainsi logiquement sur celles de droit commun), ni la période de référence à considérer (trimestres civils ou simple période de 3 mois consécutifs).
L’attente de précisions de l’administration est donc fortement recommandée.
2. Des pertes d’exploitation
3. Une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation
Pour les autres indicateurs, l’ »évolution significative », n’est pas fixée par la loi. Il faudra donc attendre que les juges saisis de litiges en la matière tranche ce point.
A ce stade, relevons que la jurisprudence actuelle n’exige pas que la « situation financière de l’entreprise soit catastrophique » (Cass. soc. 9 juillet 1997, n° 95-43722, publié au bulletin).
En revanche, les difficultés alléguées doivent être sérieuses, et non simplement passagères (Cass. soc. 28 janvier 2014, n° 12-23206).
Frédéric Rougon, Juriste
Sources :