L’information de l’expert CSE dans le cadre des consultations récurrentes
Le CSE est consulté de manière récurrente dans trois domaines prévus par les textes (les orientations stratégiques, la situation économique et financière, la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi). Dans le cadre de ces consultations il va obtenir des informations, essentiellement fournies au travers de la BDESE, afin de rendre un avis éclairé.
Le code du travail fixe les informations mises à disposition des élus du CSE pour chacune des consultations :
- Orientations stratégiques (article L2312-24 du code du travail)
- Situation économique et financière (article L2312-25 du code du travail)
- Politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi (article L2312-26 du code du travail et article L2312-27 du code du travail)
Les données évoquées sont étroitement liées au contenu de la BDESE.
Dans le cadre de ces consultations le CSE peut recourir à un expert qui va analyser les données transmises. L’expert désigné par le CSE n’a pas accès au même niveau d’information que le CSE.
Le cadre de l’information de l’expert CSE
L’article L2315-83 du code du travail dispose que « l’employeur fournit à l’expert les informations nécessaires à l’exercice de sa mission »
Ce texte fixe de manière large l’information que peut obtenir l’expert dans le cadre de sa mission.
La Cour de cassation est donc venue apporter quelques précisions.
Le 18 mai 2022 elle affirme que, dans le cadre d’une consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, l’expert CSE peut réclamer la communication d’informations complémentaires à celles présentées dans la BDESE. Ainsi, la Cour de cassation estime que l’expert n’est pas limité par le contenu de la BDESE.
Les juges rappellent que l’expert ne peut réclamer que des informations utiles à la réalisation de sa mission et des documents qui existent dans l’entreprise.
Dans deux arrêts du 19 avril 2023, la Cour de cassation se prononce une nouvelle fois sur les informations que l’expert peut obtenir de la part de l’employeur.
L’expert peut réclamer des données individuelles à l’employeur
Dans une première affaire, le CSE a désigné un expert dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi.
L’expert réclame :
- pour l’ensemble des salariés le suivi mensuel des effectifs
- le livre de paie détaillant toutes les rémunérations versées au personnel par catégories
- Pour les salariés cadres et ETAM, les fichiers électroniques de rémunérations comprenant : 1) Le matricule ; 2) Le sexe ; 3) La date de naissance ; 4) L’entreprise d’origine pré-fusion (GTM Sud, CMS, CBSE) ; 5) La DA ou service de rattachement ; 6) La date d’entrée dans l’effectif de l’entreprise ainsi que la date d’ancienneté, si elle est différente ; 7) La date de sortie de l’effectif de l’entreprise (éventuellement) ; 8) L’intitulé précis du poste dans la nomenclature de l’entreprise ; 9) Nature du contrat de travail (CDI, CDD) et échéance du contrat dans le cas des CDD ; Les rubriques sont, pour chaque salarié et pour chaque exercice, les suivantes : 10) Le groupe et le niveau à l’échéance de chaque exercice, le coefficient ….
L’employeur refuse de délivrer ces informations estimant qu’il a déjà transmis l’intégralité des pièces nécessaires à l’expertise.
La Cour de cassation considère que l’expert doit obtenir des données individuelles existantes dans l’entreprise. Elle considère ces éléments comme utiles à la mission de l’expert.
L’expert peut réclamer des données brutes
Dans une seconde affaire, un CSE est consulté sur la politique sociale , les conditions de travail et l’emploi. Il fait appel à un expert qui réclame « l’extraction de certaines informations brutes, individuelles et anonymisées sur la totalité de l’effectif ».
L’employeur refusant de fournir les éléments, l’expert agit en justice pour les obtenir.
La Cour de cassation estime que « les informations retraitées et consolidées, seules produites par la société, étaient susceptibles de fausser l’analyse de l’expert » et donc que la communication de données brutes, individuelles et anonymisées étaient nécessaires à la réalisation de la mission de l’expert.
L’expert a donc, dans le cadre de sa mission, accès à des données qui vont bien plus loin que le contenu de la BDESE. L’accès à des données brutes individualisées permet à l’expert de parvenir à un niveau d’analyse bien plus poussée que celui auquel ont accès les élus. L’analyse des fichiers du personnel est un des fondements des missions que nous réalisons en tant qu’expert CSE. En cas de besoin, n’hésitez pas à nous contacter.
Thomas Chevillotte, Juriste/Consultant expert CSE