Les règles de fixation des objectifs des salariés par l’employeur
De nombreux salariés perçoivent une rémunération variable dont le montant va être conditionné par la réalisation d’objectifs professionnels. Dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur peut fixer unilatéralement ces objectifs. Quelles sont les règles de fixation de ces objectifs ?
La communication des objectifs du salarié
S’il est admis que l’employeur peut unilatéralement fixer les objectifs professionnels du salarié il doit néanmoins respecter certaines règles.
L’employeur doit porter à la connaissance du salarié ses objectifs en début d’exercice, c’est-à-dire avant la période prise en compte pour l’évaluation de ceux-ci.
Cet impératif répond au besoin, pour le salarié, de connaître à l’avance les éléments qui vont déterminer sa rémunération.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 31 janvier 2024 rappelle qu’à défaut, l’employeur pourra être condamné à verser au salarié le montant maximal de la rémunération variable.
La Cour de cassation a admis que l’employeur peut modifier les objectifs qu’il a unilatéralement définis dès lors que ceux-ci sont réalisables et portés à la connaissance du salarié en début d’exercice.
Toutefois, l’employeur ne pourra pas modifier les éventuels éléments inscrits dans le contrat de travail du salarié et corrélatifs au variable du salarié (montant maximum, les modalités de calcul…).
De manière générale, l’employeur ne pourra, en aucun cas, modifier les éléments de rémunération variable inscrits dans le contrat de travail du salarié sans son accord.
Les caractères des objectifs du salarié
Les objectifs doivent être suffisamment précis.
L’utilisation de critères objectifs, mesurables va donc être nécessaire afin que les modalités de calcul de la part variable soient vérifiables. Le caractère vérifiable des objectifs fixés est un élément déterminant de la validité des objectifs fixés unilatéralement par l’employeur.
Enfin, les objectifs fixés doivent être réalisables. Ils doivent être cohérents avec le poste du salarié et le contexte économique.
En cas de litige, ce sera à l’employeur de prouver que les objectifs sont réalisables.
Sur ce point, la Cour de cassation a apporté des précisions importantes dans un arrêt du 3 juillet 2024.
La position de la Cour de cassation concernant l’articulation entre mandat syndical et fixation des objectifs
Dans cette affaire, un salarié est engagé en qualité de VRP. Quelques années plus tard, il est élu membre du CE (à l’époque).
Le salarié agit en justice afin de faire valoir que les objectifs fixés unilatéralement par l’employeur n’étaient pas réalisables eu égard à ses heures de délégation.
La Cour de cassation donne raison au salarié et considère qu’« il appartenait à l’employeur d’établir que les objectifs qu’il avait fixés au salarié étaient réalisables, notamment au regard des heures de délégation du salarié ».
Ainsi, la Cour de cassation rappelle que c’est à l’employeur de prouver qu’il a fixé des objectifs réalisables, mais surtout il indique que les heures de délégation dont bénéficie le salarié élu doivent être prises en compte pour mesurer le caractère réaliste et réalisable des objectifs de salarié.
Cette décision va dans le sens de la jurisprudence antérieure qui a consacré à plusieurs reprises le principe selon lequel un représentant du personnel ne doit subir aucune perte de rémunération en raison de l’exercice de son mandat.
L’articulation par un salarié de ses fonctions au sein de l’entreprise et de son mandat de représentant du personnel peut amener à des situations complexes. La maîtrise des contours de son mandat est un enjeu crucial pour chaque représentant du personnel. En cas de besoin, n’hésitez pas à nous contacter.
Thomas Chevillotte, Juriste/Consultant expert CSE