Les règles de désignation d’un représentant syndical au sein d’une UES

La Chambre sociale est récemment revenue sur les règles de désignation d’un représentant de section syndicale. Plus spécifiquement, elle se prononce sur la validité d’une telle désignation au niveau d’une UES.

Comme à tous les niveaux, la désignation d’un représentant syndical est un droit pour certaines organisations syndicales. Encore faut-il que ces dernières sachent comment le mettre en œuvre, et ce, en bonne et due forme…

 

Le principe de désignation d’un représentant syndical

Par représentant syndical, entendez délégué syndical ou représentant de section syndicale. Contrairement aux membres du CSE, les représentants syndicaux sont désignés par le syndicat auquel ils sont rattachés, et non élus.

En revanche, la distinction entre le délégué syndical et le représentant de section syndicale est importante.

Les syndicats représentatifs aux dernières élections professionnelles désignent un délégué syndical. On le désigne parmi les membres élus au CSE, les candidats aux élections professionnelles, les adhérents ou les anciens élus ayant atteint la limite de durée d’exercice du mandat au comité social et économique, selon l’effectif de l’entreprise et/ou un ordre de préférence fixé par la loi (articles L.2143-3 et L.2143-6 du Code du travail). Il a pour mission de porter les intérêts des salariés, et de l’organisation syndicale qu’il représente. A ce titre, notamment, il négocie les accords collectifs dans l’entreprise.

Aussi les syndicats non représentatifs dans l’entreprise mais qui remplissent les conditions de l’article L.2142-1 du Code du travail pour ouvrir une section syndicale dans l’entreprise désignent-ils, quant à eux, un représentant de section syndicale. Il dispose des mêmes attributions que le délégué syndical, sauf la négociation des accords collectifs (article L.2142-1-1 du Code du travail). La loi ne détermine pas de limite à la désignation. Ainsi, l’organisation syndicale est libre de désigner qui elle souhaite dans l’entreprise.

Enfin, cette désignation peut avoir lieu au niveau de l’entreprise ou de l’établissement, mais également au niveau d’une UES.

Rappel : une UES, ou Unité Economique et Sociale, se définit comme un regroupement en une unité de plusieurs entreprises juridiquement distinctes présentant des liens étroits : activités communes ou complémentaires, unité de direction, communauté de travailleurs ayant des intérêts communs. On l’institue par accord ou une décision de justice la reconnaît. Elle conduit à la mise en place d’un CSE commun à toutes les entités qui la constituent.

 

Notification de la désignation au chef d’entreprise : la particularité de l’UES

Les règles de publicité relatives à la désignation du délégué syndical sont applicables au représentant de section syndicale (article L.2142-1-2 du Code du travail). Il convient ainsi :

  • de porter son nom à la connaissance de l’employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise en main propre contre récépissé ;
  • d’afficher son nom sur les panneaux de communication des organisations syndicales ;
  • d’en informer également un agent de contrôle de l’inspection du travail.

Quid d’un RSS désigné au niveau de l’UES ? C’est précisément la question à laquelle la Cour de cassation répond dans son arrêt du 12 juillet 2022.

 

Une solution contestable du point de vue de l’information des salariés…

Le gérant de 3 sociétés créé une UES par accord collectif, constituée par ces sociétés. L’accord précise que toute société laissée en location-gérance au même gérant peut intégrer l’UES. En 2020, une organisation syndicale notifie la désignation à 11 sociétés des 13 constituant alors l’UES.

Les 13 sociétés veulent l’annulation de la désignation : selon elles, il convenait de notifier la désignation au gérant de toutes les sociétés, conformément aux textes de lois et réglementaires. Ainsi aurait-il fallu adresser une lettre par société de l’UES, même si elles avaient le même gérant.

Le juge annule alors la désignation, considérant que l’organisation syndicale aurait dû notifier la désignation à toutes les sociétés ou expressément au gérant unique lui-même.

La Chambre sociale casse et annule la décision du juge ; la notification a été adressée à 11 sociétés, toutes dirigées et représentées par le même gérant. Elle en déduit que la notification faite à 11 des 13 sociétés est nécessairement parvenue au gérant de chacune des sociétés, c’est-à-dire à la personne ayant qualité pour représenter l’ensemble des sociétés, et suffit à en faire la publicité. Peu importe donc que chacune des sociétés n’aie pas reçu de notification de désignation. Il suffit d’en informer le gérant unique. Ainsi peut-on penser que si l’organisation syndicale n’avait informé qu’une société, la solution aurait été la même.

Qu’en penser si une seule personne, représentante de toutes les sociétés, se voit adresser une telle notification, alors même qu’elle a délégué son pouvoir de direction et n’est plus jamais physiquement présent dans la société à laquelle n’a pas été notifiée la désignation ?

La solution peut poser un problème du point de vue de l’information des salariés à l’égard de la désignation… Bien que l’identité des représentants syndicaux soient affichés, en principe, sur les panneaux de communication des sociétés…

 

Fanny Jean, Juriste/Consultante experte CSE