Les conséquences de l’absence de consultation relative au règlement intérieur de l’entreprise

La Cour de cassation  a rendu de nombreuses décisions  sur l’opposabilité de clauses du règlement intérieur par des salariés en l’absence de consultation du CSE. Pour la première fois la Cour de cassation s’est prononcée, dans un arrêt du 21 septembre 2022, sur la recevabilité de l’action d’un syndicat pour remettre en cause le règlement intérieur non soumis à consultation.

L’obligation de consultation du CSE concernant l’introduction du règlement intérieur

Dans toute entreprise de plus de 50 salariés l’employeur doit mettre en place un règlement intérieur. En vertu de l’article L1321-4 du code du travail « le règlement intérieur ne peut être introduit qu’après avoir été soumis à l’avis de comité social et économique ». Cette consultation s’impose aussi en cas de modification ou de retrait du règlement intérieur.

Cette consultation est une obligation légale. Néanmoins, la loi n’indique pas les sanctions en cas de défaut de consultation du CSE. La Cour de cassation a précisé ces sanctions.

La non opposabilité aux salariés des clauses du règlement établi sans consultation

Dans un arrêt du 10 novembre 2021, la Cour de cassation rappelle qu’un règlement intérieur n’est opposable aux salariés qu’après consultation du CSE. Jusqu’alors, le juge n’avait statué que sur des demandes individuelles de salariés portant sur l’inopposabilité de clauses du règlement.

Ainsi, un règlement intérieur établi sans consultation devient inopposable aux salariés. Les sanctions prononcées sur la base de ce règlement font constamment l‘objet d’une annulation.

Dans l’arrêt étudié, la Cour de cassation  se prononce sur une action portant sur la validité même du règlement intérieur.

La recevabilité de l’action en référé d’un syndicat tendant à suspendre le règlement intérieur

La Cour de cassation dans cet arrêt du 21 septembre 2022 est saisie à l’initiative d’un syndicat.

Ce syndicat a entamé une action en référé pour demander la suspension d’un règlement intérieur établi sans consultation. Il réclame, de plus, via une action au fond, la nullité du règlement intérieur.

La Cour de cassation a estimé que l’absence de consultation « porte un préjudice à l’intérêt collectif de la profession qu’il représente ». Un syndicat a donc un intérêt personnel à agir pour demander cette suspension. Il est donc légitime a demandé la suspension du règlement intérieur établi sans consultation. Le non-respect de cette formalité est un trouble manifestement illicite justifiant le recours au référé.

La Cour de cassation déclare toutefois irrecevable l’action du syndicat concernant sa demande de nullité du règlement. Elle soulève que la consultation du CSE n’est pas une condition de validité du règlement intérieur mais seulement une modalité d’entrée en vigueur. La Cour rejette toute mesure définitive et donc toute action au fond à l’initiative d’un syndicat sur ce point.

Par conséquent, en l’absence de consultation concernant le règlement intérieur, un syndicat peut uniquement agir en référé car il s’agit d’une mesure provisoire.

Application de la décision au CSE

Cette décision rendu à propos d’un syndicat semble transposable aux CSE de plus de 50 salariés. En effet, dans ce type d’entreprise, le CSE possède une personnalité morale. Il peut donc entamer toute action en justice à condition de défendre des intérêts qui lui sont propres. En énonçant que l’absence de consultation « porte un préjudice à l’intérêt collectif de la profession qu’il représente » la Cour de cassation reconnaît un intérêt à agir aux syndicats. Il parait difficilement concevable qu’il n’applique pas cette décision à un CSE qui est garant de l’application du code du travail dans l’entreprise. Ainsi, s’il n’est pas consulté, le CSE d’une entreprise de plus de 50 salariés, pourrait agir en référé pour demander la suspension du règlement d’intérieur.

 

                                                                                                                                                                                                         Thomas Chevillotte, Juriste/Consultant expert CSE