Le sort des mandats des représentants du personnel en cas de fusion/absorption
Si, dans la plupart des cas, lors du rachat d’une entreprise, les contrats de travail sont automatiquement transférés à l’acquéreur, le sort des mandats des représentants du personnel demeure plus incertain. La Cour de cassation a donc apporté des précisions au fil des années afin de déterminer si, en cas de fusion les mandats des élus prennent fin.
Les conditions de maintien des mandats de représentant du personnel en cas de fusion
L’article L2143-10 du Code du travail dispose qu’en cas de modification dans la situation juridique de l’employeur, via notamment une vente ou une fusion, le mandat des délégués syndicaux subsiste lorsque l’entreprise conserve son autonomie juridique.
Cette règle est la même pour les membres élus du CSE (article L2314-35 du Code du travail) et les représentants de section syndicale (article L2142-1-2 du Code du travail).
La notion d’autonomie de l’entreprise cédée va donc être primordiale afin de déterminer s’il y a survie des mandats en cours.
Si l’entreprise cédée conserve son autonomie, les mandats vont se poursuivre jusqu’à leur terme sans que l’employeur puisse organiser de nouvelles élections.
À contrario, lorsqu’une entreprise cédée perd cette autonomie, les mandats expirent à la date de la reprise. Le CSE de l’entreprise d’accueil sera donc le seul consulté si l’employeur envisage des licenciements économiques après la fusion, et ce, même s’ils ne concernent que l’entité cédée.
La notion d’autonomie juridique, évoquée par le Code du travail, reste sujette à interprétation. La Cour de cassation est donc intervenue pour en définir le cadre.
La notion d’autonomie juridique
Une entité conserve son autonomie juridique lorsqu’elle reste un établissement distinct suite à la cession. L’autonomie juridique au sens strict du terme suppose une conservation de la personnalité morale de l’entreprise cédée.
Si le Code du travail utilise cette notion d’autonomie juridique, la Cour de cassation a rapidement considéré que l’autonomie devait faire l’objet d’une appréciation en fonction du droit européen.
Elle se réfère à l’article 6 de la directive européenne 2001/23/CE du 12 mars 2001 qui dispose que « Si l’entreprise, l’établissement ou la partie d’entreprise ou d’établissement conserve son autonomie, le statut et la fonction des représentants ou de la représentation des travailleurs concernés par le transfert subsistent, selon les mêmes modalités et suivant les mêmes conditions qu’avant la date du transfert en vertu d’une disposition législative, réglementaire, administrative ou d’un accord, sous réserve que les conditions nécessaires pour la formation de la représentation des travailleurs soient réunis ».
L’autonomie juridique ne doit donc pas être le seul critère retenu.
La notion d’autonomie va donc être plus large que l’autonomie juridique. Il va s’agir d’une autonomie matérielle. On va rechercher si, dans les faits, l’entité transférée reste autonome. Ce sera le cas d’une société qui poursuit son activité dans les mêmes locaux. Si le nouvel établissement ne connaît pas de changement profond dans sa composition, sa localisation ou son activité, il conserve généralement son autonomie et donc les mandats perdurent.
Le processus de cession d’une entreprise est particulièrement délicat pour les élus du personnel qui doivent gérer de nombreuses questions (sort des salariés, sort des accords collectifs, sort des mandats…). L’appréciation du cadre légal du transfert d’entreprise est donc importante lors de ces périodes. En cas de besoin, n’hésitez pas à nous contacter !
Thomas Chevillotte, Juriste/Consultant expert CSE