Le point de départ de la protection contre le licenciement des représentants du personnel avant leur prise de fonctions

 

Un arrêt du 13 janvier 2021 de la Chambre sociale de la Cour de cassation revient, au travers d’un litige entre un conseiller du salarié et son employeur, sur les règles encadrant la protection contre le licenciement accordée aux représentants du personnel en entreprise. En effet, cette décision rappelle l’état de la loi sur le point de départ de cette protection qui couvre le salarié protégé pendant et après l’expiration de son mandat mais également avant sa prise de fonctions.

 

  • La protection du conseiller du salarié débute avant sa nomination si le salarié apporte la preuve que l’employeur avait connaissance de l’imminence de sa désignation

Dans cette affaire, une salariée a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 12 novembre 2014 puis licenciée le 26 novembre 2014.

Or le 6 novembre 2014, soit avant la tenue de l’entretien, la salariée avait informé son employeur de l’imminence de sa désignation en tant que conseiller du salarié, ce qui lui permettait de bénéficier du statut de salarié protégé.

Dès lors, la salariée a demandé la nullité de son licenciement au motif que son employeur devait, pour la licencier, disposer d’une autorisation de licenciement préalable de l’Inspection du travail, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. Le licenciement aurait donc été prononcé en violation du statut protecteur prévu par la loi. La cour d’appel avait approuvé les demandes de la salariée en considérant le licenciement comme nul car prononcé sans autorisation administrative de licenciement et dès lors avait condamné l’employeur au versement de diverses indemnités.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation va adopter une position contraire : elle va estimer que bien que l’entretien de licenciement soit intervenu après la connaissance par l’employeur du futur mandat de la salariée ; il se trouvait qu’au moment où la procédure de licenciement avait été engagée, l’employeur ignorait la désignation imminente de la salariée et la protection qui y serait attachée.

Par conséquent, le licenciement du futur salarié protégé prononcé en l’absence d’autorisation de licenciement n’est pas considéré comme nul si l’employeur n’avait pas connaissance de son obligation de solliciter une autorisation de licenciement au moment d’engager la procédure de licenciement à l’encontre du salarié. Pour que le licenciement soit considéré comme nul car prononcé en violation du statut protecteur, le salarié doit démontrer que l’employeur avait connaissance de sa future désignation en qualité de représentant du personnel. Il est donc important pour un salarié dépositaire d’un mandat de d’informer formellement son employeur de l’existence de ce mandat (par exemple par lettre recommandée avec avis de réception).

  • Retour sur la protection contre le licenciement des élus du CSE et des délégués syndicaux

La protection contre le licenciement s’applique notamment aux représentants du personnel suivants :

  • Membre élu à la délégation du comité social et économique et social (CSE)
  • Délégué syndical (DS)
  • Représentant syndical au CSE
  • Représentant de proximité
  • Salarié mandaté par une organisation syndicale représentative dans les entreprises dépourvues de délégué syndical
  • Salarié ayant demandé l’organisation l’élection des représentants du personnel dans l’entreprise
  • Salarié prouvant que l’employeur connaissait l’imminence de sa candidature ou de sa désignation en tant que représentant du personnel avant d’être convoqué à un entretien préalable au licenciement
  • Conseiller du salarié
  • Conseiller prud’homal

Ce statut protecteur bénéficie autant aux titulaires qu’aux suppléants.

 

Récapitulatif des périodes de protection de certains mandats
Mandat Protection avant le début du mandat Protection pendant le mandat Protection à l’expiration du mandat
Membre élu du CSE 6 mois à partir de la publication des candidatures aux élections professionnelles Oui 6 mois après la fin du mandat
Délégué syndical Dès que l’employeur a connaissance de l’imminence de la désignation Oui 12 mois sauf si le mandat a duré moins d’un an
Salarié mandaté pour négocier par une organisation syndicale dans les entreprises dépourvues de DS Dès que l’employeur a connaissance de l’imminence de la désignation Oui 12 mois après la date de fin du mandat ou de la date de fin des négociations

 

Cass., Soc, 13 janvier 2021, n°19-17.489 ; C. trav. art. L. 2411-1 et suivants

Marie-Antoinette Mavoungou, Juriste