Le Droit d’alerte du CSE en matière de risque grave pour la santé publique ou l’environnement

Le Droit d’alerte du CSE en cas de risque grave pour la santé publique ou l’environnement

La Cour de Cassation précise, dans un arrêt du 28 septembre 2022, les conditions de tenue du registre spécial, obligatoire dans le cadre du droit d’alerte en cas de risque grave pour la santé publique et l’environnement, affinant ainsi les contours d’une obligation qui peut être lourde de conséquences en cas de manquement de l’employeur.

 

 

La mise en place d’un droit d’alerte en cas de risque grave pour la santé publique et l’environnement

Les membres du Comité Social et Economique (CSE) ainsi que tout travailleur, bénéficient de droits d’alerte qui s’exercent dans les conditions prévues par le code du travail.

Ces droits d’alerte leur permettent d’agir, dans les domaines définis par la loi, lorsqu’ils ont connaissance d’informations préoccupantes.

Les ordonnances Macron du 22 septembre 2017 ont étendu les domaines concernés par ces droits d’alerte. Elles ont, notamment, introduit un droit d’alerte en cas de risque grave pour la santé publique et l’environnement.

Les articles L4133-1 et suivants du code du travail posent le cadre de ce droit d’alerte. Il concerne tout travailleur et les élus du CSE dans les entreprises de plus de 11 salariés. L’article L4133-2 du code du travail permet aux représentants du personnel au CSE, qui constatent que les « produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement font peser un risque grave pour la santé ou l’environnement », d’alerter l’employeur sur ce point.

L’employeur a l’obligation de consigner par écrit l’intégralité des alertes émises par les différents acteurs. Cette consignation doit être mise en place via un registre spécial comprenant toute alerte portée à la connaissance de l’employeur (articles D4133-1 et D4133-2 du code du travail).

L’obligation de l’employeur de tenue d’un registre spécial

Ce registre doit mentionner les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement dont le représentant du personnel (ou travailleur) estime qu’ils présentent un risque grave pour la santé publique ou l’environnement. Il doit aussi préciser les conséquences potentielles pour la santé ou l’environnement. Enfin, le registre doit contenir toute autre information utile à l’appréciation de l’alerte consignée.

L’employeur est responsable de la mise en place et de la tenue de ce registre. Dans la décision susvisée la Cour de Cassation rappelle que le manquement à cette obligation de tenue du registre, en l’absence même du déclenchement d’un droit d’alerte, peut entrainer une sanction pour l’employeur.

En effet, s’il ne remplit pas son obligation l’employeur s’expose à une amende de 10 000 euros . En cas de récidive l’employeur encourt une peine d’1 an d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.

 

La mise au point de la Cour de Cassation concernant la tenue du registre spécial en cas de pluralité d’établissements

La Cour de cassation dans un arrêt de la chambre sociale du 28 septembre 2022 affine les contours de la mise en place de ce registre.

Dans cette l’affaire un représentant du CSE et un syndicat ont agi en justice contre leur entreprise. Celle-ci comprend plusieurs établissements, ils réclament donc la mise en place d’un registre spécial dans chaque entité.

La Cour de Cassation a rejeté la demande du représentant du CSE et du syndicat. Elle considère que dans la mesure où la société n’est dotée que d’un seul CSE, l’établissement d’un registre unique tenu au siège de l’entreprise est  suffisant au regard de la loi.

L’employeur n’a donc pas à tenir un registre dans chaque établissement s’il n’y a qu’un seul CSE.

Toutefois, la Cour de cassation n’aurait vraisemblablement pas rendu la même décision en présence d’un groupe comprenant plusieurs établissements distincts et donc qui aurait l’obligation de mettre en place plusieurs CSE.

Nous préconisons donc aux élus du CSE, évoluant dans une société comprenant une pluralité d’établissements (non distincts) ou un seul établissement, de s’assurer de la présence de ce registre. La mise en place et la tenue du registre spécial doit être surveillée par les membres du CSE et ce même en l’absence d’exercice du droit d’alerte en cas de risque grave pour la santé publique ou l’environnement.

 

                                                                                                                                                                                                  Thomas Chevillotte, Juriste/Consultant expert CSE