La consultation du CSE en présence d’un accord sur la GPEC

La Cour de Cassation, dans un arrêt du 29 mars 2023, a clarifié les conditions de la consultation du CSE en présence d’un accord sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC).

Elle donne pour la première fois son interprétation de l’article L2312-14 du code du travail et clarifie ainsi le cadre légal de la consultation du CSE.

 

consultation du CSE et accord sur la GPEC

 

L’obligation de consultation annuelle du CSE sur les mesures de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences

En vertu de l’article L2312-24 du code du travail, le CSE d’une entreprise de plus de 50 salariés doit être consulté annuellement sur les orientations stratégiques de l’entreprise. Il s’agit d’une consultation dite récurrente.

Cette consultation concerne la stratégie de l’entreprise et ses conséquences sur l’activité, l’emploi, l’évolution des métiers et des compétences, l’organisation du travail, le recours à la sous-traitance, à l’intérim, à des contrats temporaires et à des stages.

 L’article L2312-24 du code du travail indique que cette consultation porte, en l’absence d’accord ayant déterminé le contenu de cette consultation, « sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, sur les orientations de la formation professionnelle et sur le plan de développement des compétences».

La GPEC fait donc partie intégrante de la consultation sur les orientations stratégiques. Le CSE doit donc, en principe, rendre annuellement un avis sur ce sujet dans le cadre des orientations stratégiques.

Une absence de consultation du CSE en cas d’accord sur la GPEC

Le législateur a instauré l’article L2312-14 du code du travail afin d’apporter un tempérament à ce principe.

En effet, cet article dispose que « Les entreprises ayant conclu un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ne sont pas soumises, dans ce domaine, à l’obligation de consultation du comité social et économique ».

Pour rappel, les entreprises d’au moins trois cent salariés doivent engager tous les trois ans une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers.

Cette négociation porte, notamment, sur la mise en place d’un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

Ainsi, si un accord sur la GPEC a été conclu suite à cette négociation, le code du travail prévoit une exemption de consultation dans le domaine de la GPEC.

Une limitation importante de la portée de la règle du code du travail par la Cour de cassation

Dans un arrêt du 29 mars 2023 la Cour de cassation a précisé les contours de cette exemption.

Dans cette affaire une société a signé un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

Quelques mois plus tard, le CSE d’un des établissements a constaté  l’avancement d’un « Plan d’équilibre ».  

Ce plan prévoyait l’adaptation des compétences de 15 à 20 postes de deux départements se traduisant par des mobilités inter-établissements. 

L’employeur n’a pas consulté le CSE estimant que ce plan était la mise en œuvre de l’accord de GPEC.

Le CSE estimant qu’il devait y avoir consultation sur ce plan a saisi le tribunal.

Une exemption de consultation dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques

La Cour de cassation a considéré que l’exemption de consultation prévue à l’article L 2312-14 du code du travail s’applique dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques.

Ainsi, en cas de conclusion d’un accord GPEC, le CSE n’a pas à rendre d’avis sur la GPEC dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques.

Il convient de préciser que l’absence d’avis ne concernera ici que les mesures relatives a la GPEC. La consultation sur les orientations stratégiques devra avoir lieu. Seul le domaine de la GPEC ne sera pas soumis à un avis. Les autres domaines compris dans la consultation sur les orientations stratégiques devront faire l’objet d’une consultation du CSE.

Un maintien du devoir de consultation du CSE dans les consultations ponctuelles

En dehors de cette consultation récurrente la loi prévoit que le CSE est consulté de manière ponctuelle dans certains cas.

L’article L 2312-8 du code du travail dispose qu’il doit y avoir consultation du CSE sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise . Il vise notamment  les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs.

En l’espèce, le plan avait pour conséquence des mobilités entre les deux départements concernés. Il modifiait donc la structure des effectifs.

La Cour de cassation a estimé que reste soumis à consultation les mesures ponctuelles intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise au sens de l’article L. 2312-8 du code du travail, notamment celles de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, quand bien même elles résulteraient de la mise en œuvre de l’accord de GPEC.

Par cet arrêt la Cour de cassation précise que la règle édictée à l’article L2312-14 du code du travail ne s’applique que pour les consultations récurrentes et non ponctuelles.

Conclusion

Nous préconisons donc aux élus dans une entreprise ayant un accord sur la GPEC de porter une attention particulière aux conséquences des mesures prises dans le cadre de l’accord. Si les mesures prises dans le cadre de l’accord concernent l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, le CSE doit être consulté.

 

                                                                                                                                                                                                          Thomas Chevillotte, Juriste/Consultant expert CSE