Licenciement pour insuffisance professionnelle, un salarié manager ne peut se voir reprocher le laxisme de son employeur

Par un arrêt rendu le 22 février 2017 (n° 15-25023) à la publicité aussi restreinte que sa portée est limitée, la Cour de cassation rappelle la position qu’elle tient en matière de licenciement prononcé pour un motif tenant à l’insuffisance professionnelle d’un salarié.

Si l’inaptitude d’un salarié à remplir son emploi constitue bien un motif de licenciement dont l’appréciation relève du seul pouvoir de direction de l’employeur, ce dernier ne saurait valablement invoquer des faits dépourvus d’objectivité, de précision et insusceptible de vérification.

 

L’office du juge, qui ne saurait se limiter à la qualification des faits reprochés au salarié licencié, couvre la procédure suivie, dont la régularité est contrôlée, comme le motif invoqué, dont le caractère réel et sérieux sera examiné à l’aune des éléments que les parties fourniront et, au besoin, après toutes les mesures d’instruction estimées utiles. Le doute subsistant bénéficiant au salarié.

Dès lors pour les hauts magistrats, devait être rejeté le pourvoi formé par l’employeur contre l’arrêt d’appel considérant sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour insuffisance professionnelle prononcé à l’encontre d’une salariée et le condamnant à verser à celle-ci des dommages et intérêt, alors :

  • Qu’elle devait en sus de l’exercice de son activité d’avocate salariée, gérer l’établissement dont elle avait la responsabilité en développant tant l’activité d’avocat que celle, parallèle, de conseil aux entreprises ;

 

  • Qu’il n’était pas contesté qu’elle n’avait fait l’objet d’aucun reproche les trois années antérieures durant, alors qu’elle exerçait les mêmes responsabilités dans un autre établissement de l’entreprise ;

 

  • Qu’un courrier reçu des suites de la visite de son supérieur hiérarchique la quatrième année, faisant état d’un écart de facturation négatif de 45% par rapport au budget fixé et d’un retard dans la facturation, fixait une date de rendez-vous n’ayant pas eu lieu avant que ne soit finalement prononcé, quelque mois plus tard, le licenciement ; 

 

  • Que la lettre de licenciement visait l’insuffisance professionnelle de la salariée – tenant à l’incapacité professionnelle à fournir le travail que l’employeur est en droit d’attendre du salarié – qui contrairement à l’insuffisance de résultat, ne peut résulter de la seule absence d’atteinte d’objectifs et doit n’être imputable qu’au seul salarié concerné, à l’exclusion de tout autre élément ;

 

  • Que la désorganisation de son bureau par suite d’absence de personnel était incontestable, alors que la salariée rapportait la preuve de sollicitations multiples faites à son employeur en renfort de personnel face aux absences répétées d’employés de l’entité. Ce alors même que sortant d’un congé de maternité elle n’avait repris son activité qu’à temps partiel.

 

Un employeur ne saurait donc licencier un salarié pour insuffisance professionnelle lorsqu’il ne lui fournit pas les moyens matériels et humains nécessaires à la bonne exécution de sa mission (notamment Cass. soc., 19 octobre 2010, n° 09-42225) .

Frédéric ROUGON, Juriste

Source :

                – Cour de cassation, chambre sociale, 22 février 2017, n° 15-25023