Inaptitude d’un salarié à tout poste, les précisions du médecin même tardives peuvent être utiles

Deux arrêts récents rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation le 11 janvier 2017 (n°s 15-11314 et 15-22485) témoignent de l’importance pour l’employeur de ne pas se contenter de l’avis délivré par le médecin du travail déclarant l’inaptitude d’un salarié à tout poste dans l’entreprise mais, au contraire, de solliciter de sa part des précisions sur le reclassement du salarié concerné.

Par le premier arrêt (n°15-22485), les hauts magistrats réaffirment une position de principe adoptée en 2015 (d’abord, Cass. soc., 24 juin 2015 n°s  14-10163  et 13-27875 ; puis, Cass. soc., 15 décembre 2015, n° 14-11858, publié au bulletin et Cass. soc. QPC, 13 janvier 2016, n°15-20822, également publié au bulletin de la Cour) :

A réception d’un avis déclarant l’inaptitude d’un salarié à tout emploi dans l’entreprise, mais ne dispensant néanmoins pas cette dernière de l’obligation de reclassement, l’employeur peut se rapprocher du médecin du travail en vue d’obtenir des précisions.

Si, dans la réponse fournie, ce dernier exclut toute possibilité de reclassement dans l’entreprise, l’employeur peut se considérer dans l’impossibilité de proposer un poste au salarié.

Une offre de poste,  dès lors matériellement incompatible avec les préconisations du médecin, le licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement peut donc être envisagé.

Le second arrêt (n°15-11314), quant à lui, est l’occasion pour les magistrats de renforcer la valeur du rôle du médecin particulièrement après déclaration d’inaptitude.

En effet, alors que l’employeur, après l’avis du médecin du travail, s’était rapproché de ce dernier en vue d’identifier les postes susceptibles de permettre un reclassement, le médecin avait, par courrier, désigné précisément un site.

Un seul poste étant disponible au sein de cet établissement, l’employeur l’avait proposé au salarié qui l’avait refusé.

La Cour dès lors confirme l’arrêt d’appel qui déboutait le salarié de sa demande tendant à sanctionner le non respect par l’employeur de son obligation de reclassement.

L’employeur qui avait, en effet, suivi à la lettre les recommandations du médecin, exprimées après la déclaration d’inaptitude, avait, aux yeux des juges, respecté son obligation en proposant tous les postes disponibles et conformes aux dernières préconisations en date du médecin.

Notons que la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (dite Loi « Travail ») et son décret d’application n°2016-1908 du 27 décembre 2016 relative à la modernisation de la médecine, réforment la procédure entourant le prononcé de l’inaptitude d’un salarié.

Un tel constat est depuis le 1er janvier 2017 obligatoirement précédé d’échanges entre employeur, salarié et médecin du travail, permettant à chacun de faire valoir ses observations notamment sur les préconisations de reclassement du salarié inapte.

L’avis d’inaptitude physique doit être éclairé d’indications écrites relatives au reclassement et tenant compte, en principe, de ces échanges.

L’objectif étant d’écarter autant que faire se peut les litiges de la nature de ceux exposés ci-dessus.

 

Frédéric ROUGON, Juriste

 

Sources :