Information-consultation d’un CSE d’établissement dans le cadre d’un plan de reprise d’activité

La pandémie de Covid-19 et les confinements engendrés ont eu pour effet la mise en place urgente puis l’établissement définitif de nouvelles modalités de travail. Pour autant, l’instauration de mesures a été rendue nécessaire pour atteindre certains objectifs. Ces mesures ont pu être prises dans le cadre de plans de reprise d’activité notamment. Dans les grandes entreprises auxquelles appartiennent plusieurs établissements, les mesures ont parfois dû être adaptées à leurs spécificités.

Dans ce cas, il convient de ne pas oublier l’obligation de consulter le CSE central (CSEC) ainsi que, le cas échéant, les CSE d’établissement (CSEE).

Pour autant, certaines règles régissent la répartition des consultations entre ces instances. C’est sur ce point que la Cour de cassation a, dans un arrêt du 29 juin 2022, apporté une nouvelle précision.

La consultation du CSE à propos d’un plan de reprise d’activité

L’employeur a pour obligation d’informer et de consulter le CSE à propos, selon l’article L.2312-8 du Code du travail de :

« (…) questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur:
1° Les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs ;
2° La modification de son organisation économique ou juridique ;
3° Les conditions d’emploi, de travail, notamment la durée du travail, et la formation professionnelle ;
4° L’introduction de nouvelles technologies, tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ; (…) »

Ainsi, un plan de reprise d’activité post-confinement impliquant l’instauration de règles applicables en matière de santé et sécurité doit faire l’objet d’une procédure d’information consultation du CSE. Dans l’affaire évoquée, précisément, le plan contenait des mesures tenant aux éléments suivants :

  • les précautions sanitaires générales en matière de déplacement et de transport ;
  • la prise en charge des personnes contact ;
  • les modalités de travail et mesures relatives aux salariés sur site et à distance, seuls ou en équipe, voire en co-activité ;
  • la marche à suivre pour le retour progressif des équipes sur site.

Il s’agit en effet d’une thématique de consultation ponctuelle. La Chambre sociale le rappelle. C’est un aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. Ainsi, le CSEE souhaite que l’employeur engager un processus d’information consultation à ce titre.

Si le CSEE avait été simple CSE, le juge aurait effectivement dû enjoindre l’employeur de le consulter.

Pour autant, là n’était pas la seule problématique. La question était surtout de savoir si, compte tenu de la portée et teneur des mesures envisagées par le plan de reprise d’activité, le CSEE devait être consulté…

 

L’énonciation des conditions de consultation du CSEE

La société avait élaboré un plan national de reprise d’activité, puis la Direction régionale dont le CSEE dépendait avait élaboré un plan de reprise propre, sous forme de documents portant des intitulés spécifiques à la région d’activité. S’étant vu transmettre ces documents, le CSEE connaissait ainsi l’existence du plan. Considérant que le plan élaboré par la Direction régionale constituait des mesures d’adaptation spécifiques à l’établissement, le CSEE réclamait alors une procédure d’information consultation.

Or, l’article L.2316-20 du Code du travail énonce les attributions des CSEE en matière de consultation.

Les attributions consultatives du CSEE sont limitées :

  • la consultation n’a lieu que si les mesures envisagées entrent dans le cadre des pouvoirs confiés au chef d’établissement. Il doit disposer d’une certaine autonomie dans leur mise en place ;
  • il doit s’agir de mesures spécifiques à l’établissement considéré.

Par ailleurs, l’article L.2316-1 du même Code dispose de la règle selon laquelle le CSEC est seul consulté sur :

« 3° Les mesures d’adaptation communes à plusieurs établissements des projets prévus au 4° du II de l’article 2312-8 ».

 

Pas de consultation en l’absence de mesures spécifiques et de marge de manoeuvre du chef d’établissement

Pour justifier sa demande, le CSEE relevait notamment les dispositions du plan national de reprise d’activité selon lesquelles :

  • le plan devait être décliné localement ;
  • en fonction des contraintes d’environnement ;
  • et adapté à chaque direction, prenant en compte le contexte local de chaque direction.

Il considérait alors le plan régional constitutif de mesures d’adaptation spécifiques à l’établissement dont il dépendait.

Pour autant, le plan de reprise national prévoyait des règles « communes et homogènes » en matière sanitaire. De plus, le plan de reprise régional précisait :

  • décliner purement et simplement le plan national ;
  • suivre les indications issues d’une « note d’orientation générale pour la relance des activité du distributeur », tenant compte de « l’évolution des décisions des pouvoirs publics et le cadrage national d’Enedis contenu dans le PRA ».

Enfin, a priori, le chef d’établissement ne disposait pas de marge de manoeuvre dans la mise en oeuvre des mesures.

En conclusion, s’agissant de mesures spécifiques aux établissements mais communes à ces derniers, et en l’absence de marge de manoeuvre des chefs d’établissements dans leur mise en oeuvre, seul le CSEC doit être consulté sur le plan de reprise d’activité. C’est en tout cas ce qu’a décidé la Cour de cassation dans l’arrêt étudié.

 

Fanny Jean, Juriste/Consultante experte CSE