Confidentialité et obligation de discrétion pour les représentants du personnel
L’employeur doit fournir au Comité d’Entreprise comme au Comité Social et Économique des informations dont certaines sont sensibles pour la société. Cependant, ce caractère de l’information ne saurait émaner de celle-ci à sa simple lecture.
Explication.
Confidentialité prévue par la loi
La loi considère, dans certains cas, que les informations transmises au CE (ou CSE) sont « réputées confidentielles » ou confidentielles « par nature », que l’employeur l’ait rappelé ou pas. Il s’agit des informations comptables et de celles données dans le cadre d’une procédure d’alerte économique. À ce titre, elles ne peuvent donc pas être divulguées par les membres du CE (ou CSE).
Les secrets de fabrication sont également automatiquement protégés sans que l’employeur n’ait à accomplir de formalité.
Confidentialité décidée par l’employeur
Pour les autres informations, c’est l’employeur qui décide d’allouer ou non un caractère confidentiel. Il doit respecter un délicat équilibre entre son droit de garder secrètes des informations susceptibles d’être sensibles et le droit des salariés d’être informés par l’entremise de leurs représentants.
Pour rappel :
Un employeur doit préciser quelles informations situées dans la BDES ont un caractère confidentiel, en y indiquant en plus la durée de cette confidentialité. Cette durée doit être impérativement limitée dans le temps.
Certaines informations peuvent être considérées confidentielles par les juges lorsque leur diffusion est de nature à nuire à l’intérêt de la société (par exemple les chiffres des ventes envisagées pour les années à venir en France et sur différents marchés étrangers).
En revanche, une information ne peut être considérée comme confidentielle si elle est déjà largement connue du public ou des salariés de l’entreprise.
Attention :
La confidentialité ne peut pas priver le CE (ou CSE) du droit de communiquer avec les salariés. Une information relative à d’éventuels licenciements collectifs ou à une compression d’horaires ne peut pas, sauf cas absolument exceptionnels, être classée confidentielle.
L’employeur doit avoir indiqué que l’information est confidentielle
L’employeur doit indiquer, préalablement ou, au plus tard, au moment de la délivrance de l’information, que celle-ci présente un caractère confidentiel.
Les informations verbales délivrées au cours d’une réunion du CE (ou CSE) ne sont confidentielles que si l’employeur en fait mention sur le procès-verbal de cette réunion. Dans le cas de documents écrits transmis avant la réunion, il convient d’y apposer la mention « confidentiel ».
Quelle que soit sa forme, il appartient à l’employeur de justifier par des éléments objectifs le caractère intrinsèquement confidentiel des informations communiquées.
La confidentialité ne peut pas être demandée a posteriori : ainsi, l’employeur qui a communiqué des informations au cours d’une réunion du comité sans prendre le soin de préciser qu’il s’agit d’informations confidentielles ne peut plus réparer cet oubli après la tenue de la réunion.
La violation de l’obligation de confidentialité
Les membres du CE (ou du CSE) peuvent faire l’objet d’une sanction disciplinaire (mise à pied, licenciement, …) si les faits sont suffisamment graves, voire d’une demande de dommages-intérêts, s’ils communiquent aux salariés de l’entreprise ou à des tiers l’information pour laquelle la confidentialité a été exigée.
Pour rappel :
Si l’indiscrétion émane d’un expert assistant le CE (ou CSE), seuls des dommages-intérêts peuvent être demandés. Il reviendra alors au juge d’établir la réalité et l’importance des dommages effectivement causés à l’entreprise.
En revanche, l’employeur ne doit pas commettre d’abus dans l’exercice de son droit de donner aux informations qu’il transmet un caractère confidentiel. Si un usage abusif est constaté, le CE (ou le CSE) pourra saisir le juge d’une demande de reprise à l’origine de la procédure d’information-consultation (par exemple une société qui, dans le cadre d’un projet de réorganisation et de reclassement, avait placé sous le sceau de la confidentialité l’ensemble des documents transmis au comité d’entreprise sans étayer sa décision).
Un employeur ne saurait, en effet, librement faire obstacle à l’exercice par chacun de son droit à l’information (membres du CE ou du CSE mais également experts les accompagnant), inéluctable préalable à l’exercice de ses prérogatives.
Lilas LAHMIDANI, Juriste