Avantages conventionnels reconnus à certaines catégories professionnelles, extension de la présomption de justification
Par 3 arrêts rendus le 27 janvier 2015 et publiés au bulletin de la Cour de cassation, (n°s 13-22.179, 13-25.437 et 13-14.773) les hauts magistrats de la chambre sociale admettaient que les différences de traitements entres catégories professionnelles opérées par le biais de conventions ou d’accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, devaient dès lors être présumées justifiées.
Cette position, découlant notamment de la fonction de ces organisations, défenderesses des droits et intérêts des salariés et habilitées par ceux-ci afin de porter leurs voix, conduisait alors les juges à conclure que la charge de la preuve pesait sur celui en contestant le fondement et arguant alors de l’absence de toute considération professionnelle dans leur fixation.
Plusieurs arrêts rendus le 8 juin dernier (n°s 15-11.324, 15-11.478 à 15-12.021) par la juridiction pareillement composée procèdent à la confirmation de cette solution et, plus encore, à son extension.
La Haute Juridiction considère en effet que l’existence de fonctions différentes, auxquelles un accord collectif rattache des avantages particuliers, peut suffire à justifier une dérogation au principe d’égalité de traitement.
Opérant ainsi une distinction non pas catégorielle mais fonctionnelle, la convention collective de l’établissement bancaire visée par le recours (Crédit Agricole) prévoyant alors l’octroi d’un avantage spécifique (avantage logement et indemnité de résidence) à ces chefs d’agences bancaires et cadres de direction se voit donc confortée par le garant judiciaire.
L’employeur n’a pas à démontrer que la différence de traitement instituée repose sur des critères objectifs et pertinents.
En revanche, celui qui conteste la validité de l’avantage attribué (salarié, organisation syndicale non partie, etc.) devra, à l’appui de sa demande, prouver que la différence de traitement est étrangère à toute considération de nature professionnelle.
Aussi, l’appréciation concrète par les partenaires sociaux des accords et conventions qu’ils concluent devient particulièrement déterminante pour la Cour qui, dans la notice accompagnant la publication de ces derniers arrêts, précise que « les négociateurs sociaux agissent par délégation de la loi et qu’ils doivent, en conséquence, disposer, dans la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement, d’une marge d’appréciation comparable à celle que le Conseil constitutionnel reconnaît au législateur dans le contrôle qu’il exerce sur le respect par celui-ci du principe constitutionnel d’égalité. »
Frédéric ROUGON, Juriste
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