De nouvelles précisions à propos du CSE central d’entreprise

Une décision récente de la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 2 février 2022 1 mérite une attention particulière. Elle est l’occasion de revenir sur les modalités de mise en place d’un CSE central d’entreprise.

 

Quand mettre en place un CSE central d’entreprise ?

Pour rappel, une entreprise doit mettre en place un CSE lorsqu’elle compte plus de 11 salariés pendant 12 mois consécutifs 2. Or, elle peut être organisée en établissements.

Effectivement, le droit considère qu’elle est subdivisée en établissements distincts si chacun d’entre eux dispose d’une autonomie de décision suffisante. On l’apprécie à un double niveau :

  • La gestion du personnel ; 
  • L’exécution du service.

Un accord d’entreprise conclu à la majorité, en principe 3 , fixe le nombre et le périmètre des établissements.

De ce fait, une entreprise d’au moins 50 salariés qui dispose d’au moins deux établissements distincts doit instituer :

  • Autant de CSE d’établissement (CSEE) qu’il y a d’établissements distincts ; 
  • Un CSE central (CSEC).

Tandis que les CSEE se chargent des questions intéressant la gestion de leur périmètre, le CSEC s’intéresse aux sujets relatifs à la marche générale de l’entreprise excédant les pouvoirs des chefs d’établissements 4.

Ainsi, l’employeur l’informe et le consulte sur tous les projets importants en matière économique et financière, ainsi qu’en matière de santé, sécurité et conditions de travail. Le CSEC est notamment à l’origine de la désignation des experts dans ce cadre.

 

Quelle est sa composition ?

Le CSEC est composé comme suit 5 :

  • L’employeur ou son représentant et d’éventuels collaborateurs qui l’assistent ; 
  • Les délégués élus par et parmi les représentants des CSE d’établissements ; 
  • Des représentants de proximité si l’accord le prévoit ; 
  • Des intervenants en fonction des sujets traités (inspecteur du travail, médecin du travail…).

Pour ce faire, un accord conclu à la double majorité entre l’employeur et les organisations syndicales intéressées fixe le nombre de sièges à pourvoir, qui ne peut dépasser 25 titulaires et 25 suppléants. A défaut, il peut être constitué :

  • De 1 délégué titulaire ou suppléant par établissement ; 
  • De 1 ou 2 délégués titulaires et 1 ou 2 délégués suppléants par établissement 6.

 

Comment le mettre en place ?

Une fois les CSEE en place, il convient d’élire les représentants du CSEC, tous les 4 ans sauf accord modifiant la durée des mandats 7.

L’accord fixant le nombre de délégués fixe également la répartition des sièges entre les différents établissements et les différents collèges électoraux.

A défaut d’un tel accord, il convient de saisir la Direction Régionale de l’Économie, de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (DREETS) dans le ressort duquel se trouve le siège de l’entreprise. Elle doit répondre dans un délai de 2 mois, sans quoi cela vaut décision de rejet implicite.

Par ailleurs, la saisine de la DREETS suspend le processus électoral.

Par sa décision en date du 2 février 2022, la Cour estime qu’à défaut de recours devant le juge judiciaire sous 15 jours après expiration du délai de 2 mois, les élections peuvent légalement se tenir en respectant les termes d’un accord conclu.

En l’occurrence, les organisations syndicales avaient saisi la DREETS qui n’avait pas statué dans les temps. Ayant repris les négociations, elles ont donc conclu un accord. Après les élections, la DREETS a retiré sa décision implicite de rejet afin de substituer sa décision finale à l’accord. Elle demandait alors l’annulation des élections. La Cour refuse ce retrait : l’accord conclu est valable et les élections tenues le sont également.

Par conséquent, le seul moyen de remettre en cause un accord conclu après une décision implicite de rejet est de saisir le juge judiciaire 8.

 

Les préconisations des experts

Nous l’avons vu, un accord peut en effet déterminer le nombre et la répartition des sièges au CSEC entre les différents établissements et collèges électoraux. Cependant, les négociateurs bénéficient d’une liberté telle que le résultat ne garantit pas toujours une bonne représentativité des salariés au sein du CSEC.

Faire appel à la DREETS dès lors qu’aucun accord ne peut être conclu est intéressant de ce point de vue. Effectivement, elle tiendra compte de l’importance de chaque établissement, de chaque collège électoral ainsi que de chaque CSEE de manière à ce que le CSEC soit le plus représentatif possible.

Par conséquent, nous préconisons, dans l’intérêt des salariés, de négocier l’accord en fonction de ces paramètres. La représentation pondérée des établissements est la meilleure manière de refléter la réalité de la communauté de travail de l’entreprise.

 

Fanny JEAN, Juriste/Consultante experte CSE

  1. Chambre sociale, 2 février 2022, n°20-60.262
  2. Articles L.1111-1 à -3 et Article L.1251-4
  3. Article L.2232-12 al 1er
  4. Articles L.2316-1 à -3
  5. Articles L.2316-4 à -7
  6. Articles R.2316-1 et suivants
  7. Articles L.2316-10 à -12
  8. Articles L.2316-8 et -9