Le Ministère du Travail répond à 100 questions sur le CSE

Le 19 avril 2018, sur son site Internet, le Ministère du Travail a publié 100 questions-réponses consacrées à la nouvelle instance unique, le CSE, à destination des acteurs de la vie de l’entreprise. Votre expert vous en présente ci-après une synthèse des points clés.

 

 

 

 

 

 

PÉRIODE TRANSITOIRE JUSQU’AU 31 DÉCEMBRE 2019

Plusieurs prorogations ou réductions possibles                 

Les ordonnances Macron prévoient une période de transition pour laisser aux entreprises le temps de s’approprier les nouvelles règles du dialogue social. L’employeur peut, par accord collectif négocié ou seul par décision unilatérale, réduire ou proroger les mandats en cours autant de fois que nécessaire mais sous une double limite :

–              la prorogation totale ne peut être que d’une durée maximale d’un an;

–              et dans la limite du 31 décembre 2019, date à laquelle le nouveau CSE doit avoir été élu et composé.

Prorogation pour les mandats ayant pris fin entre le 23 septembre et le 31 décembre 2017

Pour les élus dont les mandats devaient initialement prendre fin entre le 23 septembre et le 31 décembre 2017, la prorogation étant automatique jusqu’au 1er janvier 2018, un accord ou une décision unilatérale pouvait, avant le 31 décembre 2017, les proroger jusqu’au 31 décembre 2018. Cette prorogation automatique n’est pas à prendre en compte pour apprécier la durée maximale de prorogation des mandats que peut imposer l’employeur.

Ainsi, par exemple, une direction peut décider de proroger les mandats jusqu’au 31 décembre 2018 alors même que les mandats devaient initialement prendre fin au 1er octobre 2017.

Cas du PV de carence

Le gouvernement évoque le sort d’un PV de carence établi avant la promulgation des ordonnances (par exemple le 3 juin 2015). Le Ministère indique que « le procès-verbal de carence établi antérieurement à la publication des ordonnances conserve sa valeur pour la durée des mandats de l’élection à laquelle il se rapporte. En conséquence, si ces mandats étaient de 4 ans, il sera valable jusqu’au 3 juin 2019 ».

En revanche, le Ministère du Travail rappelle :

  • d’une part, que lorsqu’une organisation syndicale ou un salarié de l’entreprise demande des élections, l’employeur devra, le mois suivant, engager la procédure électorale.
  • d’autre part, que l’employeur peut anticiper la mise en place du CSE en engageant le processus électoral avant juin 2019.

Organisation simultanée des élections, une simple faculté

Le Ministère rappelle que l’organisation simultanée des élections professionnelles dans l’ensemble des établissements de l’entreprise n’est pas une obligation. L’employeur peut mettre en place les CSE d’établissement à mesure qu’arriveront à échéance les mandats des membres des différents comités d’établissement.

Néanmoins, signale-t-il, « il peut être souhaitable que les élections des CSE d’établissement se déroulent à la même date de manière à procéder ensuite à l’élection des membres du CSE central ».

La survie du statut protecteur des anciens IRP non réélus

Se pose également la question de la survie du statut protecteur des salariés qui n’auront pas été réélus au sein du CSE. Le gouvernement répond par l’affirmative :

Ces derniers (les DP, membres du CE, du CHSCT ou de la DUP) bénéficient pendant la période transitoire, du statut protecteur dans les mêmes conditions que précédemment, soit pendant six mois à l’issue de leur mandat. Leur éventuel licenciement doit donc être autorisé par l’inspecteur du travail.

Le Ministère du Travail précise que les nouvelles règles de compétence territoriale définies à l’article L. 2421-3 ne s’appliquent pas aux mandats supprimés par l’ordonnance du 22 septembre 2017.

Dès lors, ces nouvelles dispositions ne concernent pas les membres du CE, du CHSCT, de la DUP ou les délégués du personnel mais en revanche s’applique aux membres du CSE, aux délégués syndicaux, etc.

MISE EN PLACE DU CSE ET REPRÉSENTANTS DE PROXIMITÉ

Négociation de l’accord de mise en place du CSE

Le Ministère du Travail affirme que « lorsqu’un délégué syndical est présent dans l’entreprise, l’employeur est tenu de négocier avec lui l’accord qui déterminera le nombre et le périmètre des établissements distincts. La négociation d’un accord avec le comité social et économique n’est pas possible, même en cas d’échec des négociations. Ce n’est qu’en l’absence de délégué syndical, que l’employeur pourra conclure un accord avec le comité social et économique ».

Désignation du représentant de proximité par le CSE

L’accord collectif qui fixe le périmètre et le nombre des établissements distincts peut instituer des représentants de proximité, qui sont,

–              soit des membres du CSE ;

–              soit des personnes, non membres, désignées par lui.

« L’accord d’entreprise ne pourra pas prévoir que les représentants de proximité sont désignés par les organisations syndicales représentatives parmi les salariés de l’entreprise. L’accord ne pourra pas non plus prévoir que les représentants de proximité sont directement élus par les salariés du périmètre d’implantation concerné ».

DÉTERMINATION DE LA COMPOSITION DU CSE

Modification du nombre d’élus et/ou du volume d’heures de délégation

Il est désormais possible de prévoir un nombre d’élus inférieur à celui fixé par le Code du travail si le volume global des heures de délégation, au sein de chaque collège, n’est pas en baisse.

A l’inverse, il est possible de diminuer le nombre mensuel d’heures de délégation tout en augmentant le nombre d’élus titulaires tant que le volume global des heures de délégation, au sein de chaque collège, n’est pas en baisse.

Détermination du nombre de représentants à élire

Le Ministère du Travail confirme par ailleurs que la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle le nombre de sièges à pourvoir doit être déterminé en fonction de l’effectif de l’entreprise au premier tour du scrutin demeure applicable.

ORGANISATION DES ÉLECTIONS AU CSE EN L’ABSENCE DE CANDIDATS

Le Ministère du Travail se positionne sur un point qui, à la seule lecture des ordonnances, demeurait à éclaircir, à savoir :

Si aucun salarié ne s’est porté candidat aux élections, l’employeur doit-il poursuivre le processus électoral ?

L’exécutif soutient que la réponse « diffère selon la taille de l’entreprise » :

Dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et 20 salariés, en l’absence de candidature dans un délai de 30 jours à compter de l’information générale des salariés sur l’organisation de l’élection du CSE, l’employeur est dispensé d’inviter les organisations syndicales à négocier le protocole d’accord préélectoral. Le processus électoral s’achève, les élections professionnelles n’ont pas à être organisées (art. L. 2314-5). L’employeur établit à cette date un procès-verbal de carence.

Les commentateurs considèrent néanmoins que l’employeur devrait définir de manière unilatérale les conditions d’organisation des élections professionnelles.

Dans les entreprises dont l’effectif dépasse le seuil de 20 salariés, l’employeur doit inviter les organisations syndicales à négocier un protocole d’accord préélectoral. A l’issue du processus électoral, si aucune personne ne s’est portée candidate ni au premier tour, ni au second tour, un procès-verbal établit la carence de candidatures aux élections professionnelles.

DÉSIGNATION DU DÉLÉGUÉ SYNDICAL

En principe, le délégué syndical (DS) doit être désigné parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli une audience personnelle d’au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections. À titre dérogatoire, il est admis qu’une organisation syndicale puisse désigner son DS parmi ses autres candidats notamment lorsque « l’ensemble des élus ayant obtenu au moins 10% des suffrages exprimés renoncent par écrit à leur droit d’être désigné délégué syndical ».

Le législateur a voulu de cette manière  faire obstacle à la Cour de cassation qui ne permettait pas de désigner un salarié n’ayant pas obtenu 10 % dès lors qu’un salarié présent dans l’entreprise avait obtenu 10 %. Le Ministère du Travail semble vouloir l’étendre à « tous les candidats » qui ont obtenu 10% des suffrages.

LIMITATION DU NOMBRE DE MANDATS SUCCESSIFS

Le Ministère confirme que la limitation à trois mandats successifs au Comité Social et Économique (CSE) ne s’applique pas rétroactivement aux mandats des élus CE, DP, CHSCT et DUP. Le décompte débutera à compter du premier mandat des membres du CSE.

Attention, cette limitation ne s’applique pas dans les entreprises de moins de 50 salariés, ni dans les entreprises entre 50 et 300 salariés si un protocole d’accord préélectoral le prévoit.

ATTRIBUTIONS DES CSE D’ÉTABLISSEMENTS

Le Ministère du Travail indique que les attributions des comités d’établissements sont déterminées en fonction de l’effectif de l’entreprise et non de celui de l’établissement. Dans un établissement de moins de 50 salariés relevant d’une entreprise de plus de 50 salariés, le CSE d’établissement exerce les attributions des CSE des entreprises de plus de 50 salariés. Cette position est aussi affirmée dans le cadre des réunions du CSE, où il est précisé que dans les entreprises à établissement multiples, le nombre de réunions est déterminé en fonction de l’effectif de l’entreprise et non de l’établissement.

CRÉDITS D’HEURES

Représentants du personnel au forfait jours

Le crédit d’heures des représentants du personnel en forfait-jours est regroupé en demi-journées qui se déduisent du nombre annuel de jours travaillés fixés dans la convention individuelle de forfait. Il est précisé que ce décompte peut se faire mois par mois.  Par exemple, si un élu en forfait-jours a effectué 24 heures de délégation dans le mois, ses heures sont regroupées en 6 demi-journées. 3 jours de délégation viendront s’imputer sur son contingent annuel de jours travaillés fixé dans sa convention individuelle de forfait.

Décompte du temps passé en réunion

Le Ministère du Travail distingue le temps passé aux réunions du CSE, payé comme du temps de travail effectif et qui n’est jamais déduit des heures de délégation, du temps passé en réunion des commissions (excepté pour la CSSCT) qui n’est déduit des heures de délégation que lorsqu’il dépasse la limite d’une durée annuelle globale de 30h par an dans les entreprises de 300 à 1 000 salariés et de 60h par an dans les entreprises d’au moins 1 000 salariés.

Répartition des heures de délégation

Les membres titulaires du CSE peuvent, chaque mois, répartir entre eux et avec les suppléants le crédit d’heures dont ils disposent (article L. 2315-9). On parle ainsi de mutualisation des heures de délégation. Celle-ci doit toujours respecter le plafond fixé par le législateur (un élu ne pouvant se voir ainsi octroyer plus d’1,5 fois le crédit d’heures mensuel attribué en principe à un titulaire).

Selon le Ministère du Travail, les représentants de proximité pourrait bénéficier de cette mutualisation.

Attention, les représentants de proximité, s’ils ne sont pas membres du CSE devraient bénéficier d’un crédit d’heures fixé par accord.

FORMATION SANTÉ ET SÉCURITÉ

Depuis la loi de ratification du 29 mars 2018, la formation en santé et sécurité au travail bénéficie à l’ensemble des membres de la délégation du personnel du CSE (l’instance absorbant les compétences du CHSCT) quel que soit l’effectif de l’entreprise.

Cette formation est organisée sur une durée minimale de 5 jours dans les entreprises d’au moins 300 salariés et de 3 jours dans les entreprises de moins de 300 salariés.

Quant aux membres de la Commission de Santé, de Sécurité et des Conditions de Travail (CSSCT), ils peuvent, rappelle le Ministère, bénéficier d’une formation spécifique correspondant aux risques ou facteurs de risques particuliers  en rapport avec l’activité de l’entreprise. Les conditions de cette formation sont fixées par accord d’entreprise.

ORDRE DU JOUR DES RÉUNIONS POUR LES SUPPLÉANTS

Le Ministère rappelle que les suppléants n’assistent aux réunions du CSE qu’en l’absence du titulaire.

Selon le Ministère du Travail, l’ordre du jour des réunions du CSE doit être communiqué par le président aux membres du CSE qu’ils soient titulaires ou suppléants. Cette transmission a pour objet d’informer le suppléant de l’ordre du jour de réunion de sorte que, le cas échéant, il puisse remplacer un élu titulaire empêché. Concernant la convocation des suppléants, un accord collectif ou un accord conclu avec la majorité des membres titulaires du CSE peut prévoir que la communication de l’ordre du jour vaut convocation des suppléants aux réunions du  Comité.

Le Ministère du Travail conseille aux CSE d’organiser les modalités de la suppléance dans le règlement intérieur du CSE.

CONSEIL D’ENTREPRISE

Le Ministère attire l’attention sur le fait que la mise en place d’un conseil d’entreprise par accord collectif ne fait pas disparaître le mandat du délégué syndical. Celui-ci continue à exercer son mandat mais il perd sa prérogative de négocier, conclure et réviser les accords collectifs de travail dans l’entreprise ou l’établissement. Dans le cadre du conseil d’entreprise, le délégué syndical s’apparente au représentant de la section syndicale actuel.

L’accord instituant le conseil d’entreprise peut-il être dénoncé ?

L’accord collectif instituant le conseil d’entreprise étant un accord de droit commun obligatoirement à durée indéterminée, les règles relatives à la dénonciation, prévues aux articles L. 2261-9 et suivant du Code du travail, s’appliquent, souligne le Ministère du travail.

Ainsi, si à l’issue du délai de survie de l’accord (3 mois + 12 mois), aucun accord ne lui est substitué, la représentation du personnel de l’entreprise rebascule dans le système de droit commun et continue de produire ses effets avec un CSE auquel s’ajoute un délégué syndical qui récupère ses pleines attributions de négociation. Le conseil d’entreprise disparaissant.

A titre conclusif

Après la rupture conventionnelle collective, c’est le CSE qui a fait l’objet d’éclaircissements de la part du Ministère du Travail. D’autres sont ainsi attendus sur la négociation collective, les relations individuelles de travail, les accords de performance collective, mais également la santé au travail et le suivi de l’état de santé des salariés.

 

Lilas LAHMIDANI, Juriste

 

Source :     Questions-réponses CSE