CE, les délais de consultation institués par la LSE dans la tourmente ?

La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi modifiait l’article L.2323-3 du Code du travail, disposant dès lors qu’à expiration de chacun des délais de consultation fixé par accord d’entreprise, par accord entre l’employeur et le Comité d’entreprise (CE) ou par la voie règlementaire, le CE est réputé avoir été consulté et rendu un avis négatif.

 

 

 

Parallèlement, aux termes de l’article L.2323-4ex article 8, II. de ladite Loi – la saisine du tribunal de grande instance (TGI) statuant en la forme des référés afin qu’il ordonne la communication d’informations nécessaires à la formulation d’un avis motivé n’a pas pour effet de prolonger les délais de consultation dont dispose alors le CE pour statuer.

Alors que la loi avait fait l’objet d’un recours devant le conseil constitutionnel en son temps (Décision du Conseil constitutionnel n° 2013-672 du 13 juin 2013), l’examen de sa conformité aux plus hautes normes du droit français n’avait nullement porté sur les subtilités de l’article 8.

 

Problématique majeure, trois principes fondamentaux s’accommoderaient difficilement avec de telles dispositions :

« Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises », il recouvre en réalité deux droits distincts : le droit à la négociation collective et le droit de participer à la gestion des entreprises » ;

 

 

Par un arrêt n° 17-13081 rendu le 1er juin 2017 (publié sur son bulletin), la chambre sociale de la Cour de cassation relevant respectivement,

  • Que l’absence d’effet suspensif du recours peut conduire l’institution représentative du personnel à perdre toute protection de son droit à l’information nécessaire à l’exercice de sa fonction, assurant la participation du personnel à la gestion de l’entreprise, en dépit de l’exercice régulier d’une voie de recours juridictionnel  ; 

(Notons, à ce titre, que par un arrêt n° 15-13363, rendu le 21 septembre 2016, la Cour de cassation à censuré pour manque de base légale la décision d’une cour d’appel ayant confirmé la suspension de la mise en œuvre d’un projet de réorganisation d’une entreprise par l’employeur, car elle n’avait pas « rechercher si le délai de trois mois dont disposait le comité central d’entreprise pour donner son avis sur le projet (…), sur lequel il avait reçu communication par l’employeur des informations précises et écrites (…), n’était pas expiré au moment où le premier juge a statué(…), en sorte que ce dernier ne pouvait plus statuer sur les demandes (…)».

Ce, alors qu’en l’espèce l’expiration dudit délai était intervenue du fait du magistrat qui, saisi en temps utile, avait statué hors le délai de 8 jours s’imposant à lui et hors le délai imparti au CE

  • Et que ces dispositions sont susceptibles de placer les comités d’entreprises dans des situations différentes selon que la juridiction saisie en vue d’obtenir des informations et un délai supplémentaire statue ou non dans le délai global imparti et consécutivement de porter atteinte au principe d’égal accès des citoyens à la justice ;

Décide de soumettre cette situation au Conseil constitutionnel par voie de question prioritaire de constitutionnalité. Ce dernier à donc 3 mois a compter de sa saisine pour se prononcer sur l’avenir du dispositif.

Frédéric Rougon, Juriste

Sources :

 

 

 

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