Budget de fonctionnement : Comment l’employeur peut-il imputer la rémunération d’un salarié mis à la disposition du CE ?

Dans un arrêt du 28 février 2018 (n° 16-25.300), la Chambre sociale de la Cour de cassation juge qu’une clause d’un accord par laquelle l’employeur s’engage à prendre en charge le coût salarial d’une assistante administrative mise à la disposition du CE n’interdit pas de déduire ce coût du budget de fonctionnement du comité.

 

En l’espèce

L’affaire qui nous occupe est la suivante :

Un Comité d’Entreprise avait saisit le tribunal de grande instance car il était en désaccord avec la déduction opérée par l’employeur sur son budget de fonctionnement correspondant aux salaires d’une assistance administrative mise à la disposition de l’instance par l’entreprise. Le comité en réclamait alors le remboursement.

Les termes de l’accord de droit syndical de l’entreprise prévoyait, à titre de « moyen complémentaire », la mise à disposition d’une assistante administrative prise en charge par l’entreprise à compter d’un seuil d’effectif de 500 salariés.

Ainsi considéré comme un « moyen complémentaire » par le CE, le coût de cette prise en charge ne devait selon l’instance ne pas être retenu du montant dû par l’employeur au titre de la subvention de fonctionnement, l’entreprise n’établissant pas par ailleurs que le temps de travail de la salariée était exclusivement consacré à la gestion des besoins de fonctionnement du comité.

Les juges du fond examinant l’accord collectif d’entreprise considérant alors que, dans la mesure où l’accord identifiait deux budgets distincts (Activités Sociales et Culturelles/Fonctionnement) et que, selon ses bulletins de salaire, la salariée était affectée à temps complet à des tâches de secrétariat, il s’agissait dès lors d’une dépense de fonctionnement imputable sur ce budget. Ces derniers relevaient néanmoins le caractère équivoque des fonctions de la salariée mise à disposition, qui, exerçant des  « travaux de secrétariat », pouvaient également voir affecter sa rémunération au budget des ASC.

 

Etat actuel du droit

Le Code du travail prévoit que l’employeur verse au CE une contribution au fonctionnement d’un montant annuel équivalent à 0,2 % de la masse salariale brute. Ce montant s’ajoute, en principe, à l’éventuelle subvention destinée aux activités sociales et culturelles, sauf si l’employeur a déjà fait bénéficier le comité d’une somme ou de moyens en personnel équivalents à 0,2 % de la masse salariale brute.

Cela signifie que l’employeur peut diminuer le montant de la subvention de fonctionnement du montant des frais liés à des moyens matériels ou humains qu’il met à la disposition du comité et qui sont liés à son fonctionnement. Il peut procéder à cette déduction de son propre chef, sans obtenir l’accord exprès du comité (Cass. soc., 25 oct. 2017, n° 16-10.573).

Attention : Il est important que les dispositions de l’accord d’entreprise prévoyant la mise à disposition de personnel par l’employeur soient rédigées d’une façon très claire quant à la finalité de la mission dudit personnel.

En effet, pour la Cour de cassation, un accord collectif qui prévoit que soit déduit du budget de fonctionnement le coût salarial du personnel mis par l’employeur à la disposition du comité, sans distinction entre son affectation aux ASC et son affectation au fonctionnement proprement dit du comité, est illicite, car il revient à autoriser indirectement le financement des ASC par le budget de fonctionnement (Cass. soc., 10 juill. 2001, n° 99-19.588).

 

A titre conclusif

Point d’attention : Il est vivement recommandé d’établir un écrit dans le cas d’une mise à disposition et, au-delà, de se montrer le plus précis possible quant à la finalité de la mission des personnes concernées et quant à la question de savoir si l’employeur pourra ou non déduire du budget de fonctionnement la valeur de ces moyens supplémentaires/complémentaires mis à la disposition du CE.

Enfin, le principe retenu par la Cour de cassation a vocation à s’appliquer au budget de fonctionnement du Comité Social et Économique. Cette jurisprudence conservera donc tout son intérêt une fois le CSE en place dans l’entreprise.

 

                                                                                                                                                                                      Lilas LAHMIDANI, Juriste

 

Sources :